19 avril 2024

Présentation du livre : Vivement la décroissance !

Le nouvel an zéro ou le péché d’orgueil

Jésus naquit à Bethléem trois ou quatre ans avant le début de l’ère chrétienne et son œuvre fut consacrée à tenter de racheter le péché originel. Cet évènement advint peu avant la mort d’Hérode Ier et le monde occidental en fut transformé, mais, d’un point de vue formel, on attendit presque mille ans pour que, à l’initiative d’un moine anglo-saxon vivant au temps de Charlemagne et resté dans la postérité sous le nom de Bède le Vénérable, notre calendrier soit initialisé sur la date de naissance du Christ, à la manière des Romains comptant la date du jour à partir de la fondation de leur ville.

Après lui, on prit l’habitude de dater l’année en cours à partir de ce fameux anniversaire. L’apparition de Jésus de Nazareth sur terre marqua donc le début d’une nouvelle ère pour l’Humanité, mais le départ effectif du mouvement subit un délai trente ans pour cause de vocation tardive, les changements notoires induits accusèrent un retard d’un ou deux siècles en raison du faible développement des médias de l’époque et de l’absence de Facebook, et enfin, comme indiqué plus haut, la ratification calendaire fut contrainte à une attente de plus de huit cent ans pour des motifs restés inexpliqués. Il est à parier que ces regrettables atermoiements ne se reproduiront pas lorsque, d’ici quelques années nous entrerons de plein pied dans l’ère de la décroissance.

Le point de départ de ce nouvel âge sera celui du croisement de la courbe de l’offre et de la demande mondiale de pétrole. En effet, la production d’or noir qui a réussi à satisfaire, grâce notamment à l’Arabie Saoudite, la demande continuellement croissante des pays consommateurs va bientôt devenir insuffisante par suite des effets conjugués d’une augmentation encore plus grande de la demande mondiale renforcée par l’appétit des pays émergents, et de la diminution des ressources, nonobstant l’apport de pétroles non conventionnels (schistes, sables, offshore profond, etc…), au demeurant infiniment plus coûteux que ceux extraits des « champs faciles » de Gawhar.

Mais, comme pour la naissance de Jésus, cet instant passera inaperçu au moment où il surviendra, car nombre de paravents seront dressés devant lui afin de masquer la vraie réalité aux yeux d’une population n’ayant d’ailleurs aucune intention d’y souscrire. Cette volonté de cacher, du côté des politiques, associée au refus d’y croire, du côté du peuple, déclenchera une période de flottement dans l’attente d’un nouveau dogme, à l’image du temps qui s’écoula entre les premiers travaux de propagande de Jésus et l’avènement du christianisme.

Mais le parallèle ne s’arrête pas là ! A l’instar du Christ mandaté sur Terre par le Créateur pour réparer le péché originel, c’est Dame Nature en personne qui, dans quelques années, viendra punir l’Homme pour avoir commis une autre faute, celle de péché d’orgueil…….

Mais si le péché originel était de nature spirituelle, le péché de l’Homme moderne, lui, est de nature écologique ! Lorsque Adam touche à l’arbre de la connaissance et du savoir, domaine réservé de Dieu, il pèche par désobéissance envers celui qui Sait, par outrecuidance de vouloir mieux le connaître et, pourquoi pas, prétention de se hisser à son niveau. L’homme civilisé est inspiré par une recherche somme toute similaire car, en s’interrogeant son environnement, il empiète aussi sur le domaine réservé de la nature, en voulant objectivement se mettre à son niveau, voire la dominer.

Contrairement à une idée communément répandue, le péché de l’homme moderne ne réside donc pas dans son utilisation controversée des ressources naturelles, mais dans le fait qu’il analyse lui même sa démarche dans le même temps qu’il la poursuit. En effet, ses fameuses actions anthropiques sont en réalité sans danger aucun pour la Planète qui pourrait survivre sans problème à un hiver nucléaire prolongé et repartir de plus belle à partir de deux cafards et trois cancrelats vers un foisonnement de vie encore plus riche que celui que nous connaissons actuellement. Il suffirait pour cela d’attendre quelques milliers d’années, c’est à dire l’espace d’un battement de paupière pour cet astre vieux de 45 millions de siècles.

La menace de la civilisation industrielle sur la biodiversité, dont on nous rebat les oreilles, n’est en fait pas plus inquiétante qu’une brise légère sur un lac tranquille pour une barque de pêcheur, lorsqu’on sait que la Terre a déjà connu pas moins que six extinctions massives des espèces avec chaque fois apparition de nouvelles et réapparition d’anciennes. A la fin du Crétacé, les dinosaures, espèce dominante, disparurent après 160 millions d’années de bons et loyaux services, alors que l’espèce hominidée n’est présente que depuis 7 millions d’années seulement. Quant à la pollution, celle de la société humaine moderne fait pâle figure comparée aux émissions de méthane des gigantesques sauropodes qui pouvaient atteindre 520 millions de tonnes par an, chiffre comparable à celui des émissions modernes.

Et que dire de l’épouvantail du réchauffement climatique alors que nous savons que la Planète a déjà été beaucoup plus chaude, humide, froide et même glacée selon les âges et les temps, en conservant toujours son même teint de jeune fille.

Aujourd’hui, le péché d’orgueil humain ne réside donc pas dans le fait de puiser dans la dot terrestre, même à un rythme effréné, car il est dans la nature de toutes les espèces vivantes de suivre le cours de leur instinct sans se préoccuper des conséquences sur la biodiversité, le climat, la pollution, etc… autant de termes modernes qui consacrent ce fameux péché d’orgueil, celui qui entraîne l’homme, espèce animale éphémère, à vouloir réfléchir sur ses relations avec la nature, en tirer des conclusions et imaginer de pouvoir changer le cours des choses.

  • L’homme puise sans compter dans les ressources fossiles, végétales, animales, et alors ?….
  • L’homme, pour nourrir une population toujours plus demandeuse, ponctionne la biodiversité et provoque la disparition de certaines espèces, et alors ?…..
  • L’homme sème des papiers gras et des résidus d’emballages un peu partout, et alors ?….
  • L’homme dissémine dans l’air des odeurs nauséabondes, et alors ?….
  • L’homme fait marcher des usines qui réchauffent l’atmosphère (ce qui reste à prouver), et alors ?…

Tout ceci ne dérange en rien la Planète, qui s’en contrefiche, et ne menace aucunement la survie à terme de Dame Nature, qui n’est pas à un million d’années près ! La vérité vraie est que l’homme, en dégradant ainsi son environnement perd en confort ce qu’il gagne en efficacité, ce qui lui pose un problème insoluble dans la croissance. Et afin de créer, pense-t-il, une dramaturgie plus en rapport avec sa grandeur, il feint d’ignorer l’essentiel pour battre sa coulpe sur des points de détails plus spectaculaires, à savoir ses maigres atteintes à l’environnement. Dans la foulée de son délire mégalomaniaque, il détourne une science neutre, l’écologie, étudiant l’interaction des êtres vivants avec le milieu qui les entoure, en une doctrine spiritualo-politique, l’écologisme, qui milite pour la mise en place d’actions visant à réduire les effets induits de cette même interaction.

Le raisonnement couramment tenu par les pseudos-scientifiques plus ou moins écologistes est celui-ci : « nous (sous–entendu nous les hommes, les petits génies de l’Univers) avons le pouvoir de détruire des espèces vivantes, mais nous avons également le pouvoir de les protéger (sous-entendu de ne pas les détruire, ou de nous attacher le bras qui les tue,..) ». Et c’est ici, à ce moment-ci et dans cette configuration-là que le péché d’orgueil, insidieux, s’installe !…..

Car l’homme n’est pas programmé (par la nature) pour prévoir, mais pour agir, et tel Adam, défiant Dieu en grappillant l’arbre de la connaissance du Bien et du Mal, l’homme industrialisé défie la nature en proclamant qu’il la peut la défaire et la refaire. Ainsi le pouvoir de refaire ou de réparer prend le pas sur celui de défaire ou d’abîmer, et confine au pouvoir absolu, qui est celui de faire tout court. De fil en aiguille, de croissance en développement, de science en technologie, l’homme civilisé ne se considère plus comme simplement le roi des animaux, mais comme le prince de la Planète, et, enivré par son pouvoir de destruction rêve de maîtriser la genèse. D’où son écologisme pécheur, véritable offense à la Divinité Nature, qui, du haut de sa couche d’ozone se désespère de voir son rejeton préféré cumuler les bévues dans l’exercice de sa mission :

  1. croire qu’il détériore la Planète alors que celle ci en vu d’autres depuis 4,5 milliards d’années,
  2. croire qu’il peut, ou qu’il doit, contrôler ce qu’il prélève sur sa dot alors qu’elle ne lui a été livrée que pour satisfaire à sa propre jouissance,
  3. réfléchir sur son action au lieu de suivre son instinct comme toutes les autres espèces,
  4. croire qu’il peut prévoir ce qui va se passer et modifier en conséquence son action, alors que sa principale qualité est l’adaptation à ce qui arrive (et non la projection dans le futur, sinon cela se saurait depuis longtemps),

Bref, l’Homme s’occupe de choses qui ne le regardent pas et le dépassent. Son cerveau, qui fait merveille dans le bricolage inventif, n’est pas prévu pour comprendre des notions aussi fondamentales que l’infini ou le commencement, la preuve en est qu’il en est réduit à inventer de navrantes sornettes religieuses pour ne pas sombrer dans la neurasthénie dévalorisante. Il s’engouffre en pleine hérésie lorsque, par exemple, il s’imagine pouvoir contrer un réchauffement climatique qu’il aurait lui même généré en envoyant dans le ciel des millions de panneaux réfléchissant destinés à filtrer les rayons de l’astre majeur et éviter ainsi à la lagune de Venise de s’enfoncer encore un peu plus dans la mer. Ce délire de géo-ingénierie, dernier stigmate en date du péché d’orgueil écologistique, montre, s’il en était encore besoin, l’errance mentale et le désordre spirituel dans lesquels nous nous sommes tombés.

Par bonheur, et pour nous extirper du péché, Dame Nature nous envoie la Décroissance. Tel Jésus Christ en l’an zéro, elle est déjà sur place mais peu le savent, elle produira ses effets naturellement dans quelques temps sans qu’il soit besoin de précipiter le cours de l’histoire, et l’homme redeviendra humble, c’est à dire se contentera de déchiffrer une partition tout simplement adaptée à la symphonie vivante.

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